Traces et agencement de l'espace public de Montréal à travers ses interfaces municipales
Présentation

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La ville mode d’emploi est présentée à l’École de design de l’UQAM en collaboration avec le Centre de design à partir du 1er décembre 2021.

La ville mode d’emploi expose un projet de recherche sur les interfaces municipales de la Ville de Montréal. Entrepris en 2017, le projet étudie les dispositifs spatio-temporels qui régulent l’interaction des citoyens avec la ville administrative, juridique et politique, des artefacts urbains aux bâtiments en réseau. Le projet part de l’hypothèse que ces interfaces agissent comme médiatrices dans l’émergence de l’espace public urbain, qui, dans sa dimension politique, se qualifie et se requalifie dans un processus dialogique continu par la rencontre entre l’individu et l’entité municipale.

Bien qu’elles soient de formes et d’échelles différentes – infrastructures, bâtiments, artefacts urbains ou objets – ces interfaces ont en commun qu’elles connectent la ville et ses occupants selon diverses chorégraphies. Au-delà des apparences banales et des incohérences esthétiques de l’ensemble se trament les répétitions, les lignes directrices, les politiques et les a priori de l’appareil municipal : services, statuts juridiques, heures d’opération, systèmes de gestion de l’attente, normes municipales, standards ergonomiques, codes de construction, etc. Le projet s’intéresse à la manière dont chaque interface formalise cette chorégraphie en tant qu’agencement d’objets, de personnes et de pratiques, et participe ainsi à la disposition et à la distribution de l’agentivité. Les interfaces sont des politiques en elles-mêmes : de petits dispositifs dans l’appareil municipal qui agissent comme liaisons entre la ville et ses occupants, qui existent, l’un pour l’autre, à travers cette médiation. Le dispositif municipal participe activement, par son aménagement physique, à la définition du sujet.

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    Le projet distille l’information du général vers le spécifique, d’un répertoire des interfaces à la grandeur de la ville à une étude ciblée de 10 dispositifs, et propose une lecture transversale de ces derniers : l’abstraction de leurs qualités spatiales et matérielles et leur réagencement. Le résultat est à la fois le témoignage d’une condition existante de l’espace municipal et la projection de ses qualités latentes.

    Les cas étudiés partagent quatre principales caractéristiques. Ils ont une présence physique, soulignant l’importance de l’interaction en personne à un moment où les services publics ont tendance à se dématérialiser. Ils sont gérés par la Ville centrale ou ses arrondissements et ont été conçus, construits ou rendus opérationnels entre 2000 et 2015 et donc dans une période marquée par la centralisation et la décentralisation successives des juridictions municipales montréalaises. Leurs limites spatio-temporelles dépassent leurs sites, leurs quartiers et leurs arrondissements, et connectent la ville et l’individu, le public et le privé, spatialement et symboliquement. Ils sont ainsi étudiés en tant que séquences et se comprennent aussi bien en tant qu’objets singuliers qu’en tant qu’éléments d’un réseau; chaque cas fait partie d’un ensemble de cas similaires mais non-identiques. Les interfaces étudiées se rapportent au politique, au judiciaire, au savoir, à la mobilité et à l’environnement et incluent les cas spécifiques suivants : bac pour la collecte des matières récupérables résidentielles, arrêt d’autobus et station de métro, poste de police de quartier, bureau de scrutin, bibliothèque, centre communautaire, bureau d’information citoyenne, salle du conseil, cour municipale et écocentre. L’analyse fait abstraction de l’échelle et de la fonction de chaque dispositif pour étudier ce qui caractérise l’interaction municipale dans son ensemble et de manière transversale.

    L’espace public qui est le produit de cette interaction se caractérise par ses délimitations, ses protocoles, ses codes, ses connexions externes et ses temps; éléments qui, par leur rencontre, forment l’agencement d’un commun municipal. Tracer ce commun signifie rendre compte des capacités de tout élément – protocole, objet, guichet, bâtiment, réseau – à répartir, disposer, limiter, permettre, réguler et donner forme à ce qui nous sépare et nous unit simultanément.

« La connaissance du tout et de ses lois, de l’ensemble et de sa structure, ne saurait être déduite de la connaissance séparée des parties qui le composent… seules les pièces rassemblées prendront un caractère lisible, prendront un sens. »
Georges Perec, La vie mode d’emploi

« Vivre ensemble dans le monde: c’est dire essentiellement qu’un monde d’objets se tient entre ceux qui l’ont en commun, comme une table est située entre ceux qui s’assoient autour d’elle; le monde, comme tout entre-deux, relie et sépare en même temps. »
Hannah Arendt, Condition de l’homme moderne

Toutes les photos: Thomas-Bernard Kenniff